Points de vue d'acteurs Europan 14

Forum Inter-Sessions E13/E14 - Badajoz (ES) - Débat

Points de vue d'acteurs Europan 14

Alain MAUGARD
Président Europan France

Le titre d’Europan 14, c’est « Villes Productives » au pluriel. Et tout le monde a parlé jusqu’ici de « la ville productive ». Mais le titre est plus riche que « la ville productive », car il va y avoir une interrogation sur les formes de contenu de la question de « la ville productive », qui sont très différentes selon les climats, les cultures et le degré de maturité d’entrer dans le XXIe siècle. On a donné beaucoup d’exemples de l’industrie, mais la première question est celle des champs de la production de la ville. Il n’y a pas que les biens industriels ; il y a également ce qu’on pourrait appeler le nouvel artisanat, ou l’artisanat industriel, avec les systèmes d’impression 3D, etc., dont l’aventure commence au XXIe siècle. Il y a aussi les services – une ville productrice de services, c’est de la production. Et la façon dont cette production de services est faite, s’ils sont partagés, échangés, ça change tout dans le fonctionnement et les modes de vie de la ville. Il y a l’énergie, selon qu’une ville produit une partie de son énergie ou pas. Si elle en produit, elle va avoir des réseaux d’intelligence, smart grid, on va échanger, la block chain va se mettre en place. Il y a la question de tous les produits recyclés. Une ville produit des déchets et si elle les recycle, ceux-ci deviennent des ressources. L’économie circulaire fait donc aussi partie de cette question de la ville productive. Et à ce moment là, le problème est un changement de société, parce que c’est ça que nous proposons à Europan 14 : ce n'est pas tant la production, ou le côté productif (généralement résumé à l’industriel), que les changements que cela implique pour la ville – la ville doit accepter un changement d’essence de ce qu’est la ville : elle doit être un lieu de production. Et c’est un lieu de production avec toute cette variété de productions qui doit avoir plus d’autonomie. Et il y a donc une ambition énorme, qui est le rapprochement entre producteur et consommateur avec de l’emploi local, avec la connaissance de qui produit et qui consomme, avec d’ailleurs des jeux très intéressants où on est tantôt producteur, tantôt consommateur. Et ce même jeu a lieu également dans les services. Sur l’énergie, lorsqu’on est producteur d’énergie, on est aussi consommateur d’énergie. Il me semble donc que c’est une modification totale du fonctionnement des villes qui est en jeu.
Il reste une question pour nous, urbanistes, qui est celle de la taille de ces productions. Vous avez pris des exemples très intéressants de la production industrielle. Comme il y a eu la concentration pour des effets de productivité, ce sont des grosses tailles. Alors comment faire rentrer un gros caillou dans une ville qui a des petits espaces ? Ça ne marche pas. Donc le gros caillou a été sorti de la ville. C’est pareil pour les espaces commerciaux, les hypermarchés, ainsi que pour les espaces de logistique. Or, à mon avis, une des questions urbanistique d’Europan 14, c’est celle de la réinsertion des petits cailloux, voire même du sable (qui sont des petites unités de production, au sens services, biens, production alimentaire…) dans le cœur des villes ? Il me semble que c’est un champ fantastique. Et à ce moment-là, la question de savoir si on doit voir ou pas ces productions est caduque ; si c’est le projet économico-social de société de la ville, tout le monde sera content de voir ces productions.

María Ángeles LÓPEZ AMADO
Directrice générale de l’Architecture, Junta de Extremadura (ES)

J’aurais souhaité faire quelques remarques sur le sujet et les exemples qui ont été présentés. Premièrement, le thème des Villes productives pour E14 me semble tout à fait approprié. L’Extremadura est une région très productive sous de nombreux aspects. La région a notamment bien conservé son patrimoine historique, et un exemple de productivité serait l’espace où nous sommes aujourd’hui : un bastion construit entre le XVIe et le XIXe siècles, puis utilisé comme arène (avec un nouvel usage, donc), et enfin, transformé en palais des congrès pour réactiver ce quartier de la ville.

Rue principale de La Bazana
Anciens magasins abandonnés
 

Deuxièmement, pour la Junta de Extremadura, la ville productive est directement liée à la question sociale. La situation est paradoxale : beaucoup de gens ont besoin de logement et d’usages, mais il y a beaucoup de maisons vides sur le territoire.
Et troisièmement, Europan 14 est une opportunité pour l’Extremadura. Tous les exemples qui ont été montrés précédemment concernent des villes. Mais l’Extremadura est un très grand territoire productif qui est rural, avec 75% de villages de moins de 2.000 habitants. La population y est vieillissante et en déclin. Notre ville productive est donc en fait un petit village, mais un village qui pourrait agir comme une graine pour pouvoir étudier ces nouveaux usages productifs. La région d’Extremadura a toujours « nourri » les villes plus grandes de sa population, et je pense qu’aujourd’hui, la tendance pourrait être inversée et notre région pourrait devenir un lieu où les gens reviennent. C’est pour cela qu’Europan 14 est si important. Je souhaiterais également entendre parler de clefs territoriales.

Isabel GIRAULT
Architecte, urbaniste, Genève (CH)

Je voulais apporter un témoignage genevois. Tout d’abord, dans ce débat très riche, il y a énormément d’idées sur des registres différents, à des échelles différentes, et selon les cultures. On peut prendre le problème de façons extrêmement différentes. Il vraiment important de savoir comment tirer parti des atouts de son territoire pour les réintégrer dans la productivité ou faire émerger une nouvelle productivité sur une ville ou sur un territoire.
Mais je voulais apporter le témoignage de la planification que l’on peut faire sur Genève, avec une vraie problématique sur la question du maintien des activités de faible valeur ajoutée dans une ville où tous les espaces sont utilisés pour faire de la valeur et toujours plus de valeur économique. Et ça, c’est une question de fond qui rejoint beaucoup les exemples de Bruxelles, d’Amsterdam et de Barcelone. C’est que finalement on a beaucoup de facilité à intégrer des activités de hautes valeurs ajoutées : toutes les fonctions de connectivités, c’est formidable, c’est très facile à intégrer, mais même l’agriculture urbaine peut être assez facile à intégrer : on voit très bien les espaces qu’on va pouvoir façonner autour de l’agriculture urbaine dans la ville, à condition de résoudre les problèmes de pollution bien sûr, ainsi que les problèmes de société, car ce sont d’autres acteurs qui vont se saisir de cette activité-là. Mais l’activité industrielle demeure une grosse question, parce qu’elle est incompatible par les normes mêmes qu’on s’est données, et à Genève on a un vrai problème avec ça : même un carrossier ne peut pas être mis en rez-de-chaussée d’un immeuble, car les normes environnementales ne le permettent pas. Donc comment faire ça, comment arriver à mixer ça et comment maintenir, dans un territoire, une activité qui, malgré sa valeur ajoutée, n’a plus de place, alors qu’on en a vraiment besoin pour sa fonction sociale. Comment manipuler ce matériau de l’industrie et d’activités ?

Comment tirer les atouts du territoire ?
Comment intégrer l'activité industrielle ?
 

À Genève, on a introduit une nouvelle façon de faire. On est très peu d’espace, le canton est tout petit, et il nous faut donc trouver de nouvelles solutions. Aujourd’hui, on voit arriver des hôtels industriels. J’ai vu qu’à Amsterdam et à Bruxelles, il y avait aussi ce genre d’exemple, où on essaye de mixer les fonctions et de faire des hôtels industriels, mais néanmoins, cela veut dire qu’il faut faire monter les camions dans les immeubles. Et là, on voit apparaître un nouvel acteur, qui est l’acteur immobilier, qui produit plusieurs surfaces d’activités industrielles dans un même hôtel, mais c’est un intermédiaire entre l’industriel et le client final. C’est donc une nouvelle structure de développement qui apparaît, avec un coût à absorber. Donc comment faire la péréquation avec d’autres fonctions dans la ville ? C’est vraiment tout un montage, mais il est vraiment important de se pencher sur ce problème pour que les villes qui n’ont pas forcément les moyens de subventionner l’activité industrielle puissent le faire. Les villes riches ont probablement des moyens, mais quand on prend l’exemple de Barcelona, avec le Poblenou, l’activité artisanale qui est introduite n’est pas du tout l’industrie lourde. Il y a donc un problème : où mettre cette activité qui nécessite qu’on accepte des nuisances ?

Jaume BARNADA
Directeur de la Stratégie et de la Durabilité urbaine, Barcelona (ES)

Je souhaiterais donner plus de précision sur la façon dont nous envisageons le thème à Barcelona. Le quartier le plus productif de la ville, celui où l’économie est la plus florissante, est le centre-ville, l’Ensanche, et ce, depuis sa création il y a 150 ans. Ce qui signifie que la zone la plus productive et où l’économie est la plus florissante se caractérise par une densité et une mixité élevées. Et c’est important pour nous. Nous ne plaidons en aucun cas pour la séparation des usages ; nous pensons que la ville est un mélange de densité, de compacité et de mixité. Et c’est là qu’est produite l’activité. Ce que nous pouvons cependant questionner, c’est le type de domaine d’activités à mettre en place dans le centre-ville. Dans le cas de Barcelona, ce serait la petite industrie (qui existe déjà et fonctionne très bien) ; les services, évidemment, puisque nous sommes une grande capitale ; la connaissance et tout ce qui en émane ; on ne peut évidemment pas intégrer une usine de production de voitures au cœur de la ville, mais il pourrait y avoir un bureau de design automobile. Et le dernier élément, qui a toujours été présent, c’est l’artisanat et les petites activités sur lesquelles les villes ont toujours pu compter. Je ne vois pas la différence entre les artisans hipsters et ceux du temps de mes grands-parents. Il y a toujours eu des cordonniers à Barcelona, la seule chose qui a peut-être changé, c’est la couleur de la devanture. Le débat principal pourrait donc être celui de la façon dont les activités économiques se rassemblent dans la ville. Comment peuvent-elles être compatibles entre elles ? Et, in fine, comment protéger les logements du centre-ville, ou comment introduire du logement dans les territoires productifs ?

Protéger le logement en centre-ville
Mélanger densite, compacité et mixité
 

Francis KLEITZ
Maire de Guebwiller (FR)

Nous sommes une des villes candidates pour Europan 14, et certainement une des plus petites villes. Le site que nous proposons est une part substantielle de la ville. Toute notre attente d’Europan, c’est de savoir justement jusqu’où peut aller le rôle d’un architecte urbaniste. Guebwiller a aujourd’hui une certaine attractivité en matière résidentielle, mais, ancienne capitale textile, elle a perdu beaucoup d’attractivité industrielle, que nous aimerions retrouver, en tout cas en partie. Guebwiller est à mi-chemin entre deux villes de taille plus importante, mais a néanmoins un rôle de bourg-centre pour tout un territoire d’à peu près 60.000 habitants. Qui plus est, la ville est située à l’entrée d’une vallée et est un lieu de ravitaillement, d’emplois et de vie culturelle pour toute la vallée. Le site proposé doit ramener un certain équilibre aujourd’hui pour éviter que la ville se transforme simplement en ville-dortoir et que les gens soient obligés de se déplacer vers des villes plus importantes, mais plus éloignées, pour travailler. Nous avons tout un quartier à refaire et jusqu’où l’architecte urbaniste peut-il contribuer à une attractivité globale qui va au-delà du résidentiel et ramener une activité économique. C’est tout ce challenge que nous attendons des futurs projets.

Héritage industriel
Relancer l'attractivité globale
 

Jonathan WOODROFFE
Architecte, S333, Membre du Board Europan Nederland

Selon moi, il est très important de fixer des ambitions sur les objectifs à atteindre par le concours. Nous devrions tenter de comprendre où sont les limites dans la réalisation de cette nouvelle condition urbaine ; de comprendre ce qui peut être intéressant si les jeunes architectes considèrent réellement les facteurs déterminants (qui relèvent des règlements de planification et du contrôle des bâtiments) et de voir dans quelle mesure ces questions doivent être à nouveau soulevées pour permettre à certains types de nouvelles conditions urbaines d’exister. Il existe actuellement des jeunes bureaux très intéressants au niveau européen, qui étudient les règles des bâtiments et se basent sur des recherches fondées sur des données probantes. Il est donc selon moi essentiel d’être on ne peut plus réalistes et, en même temps, d’avoir une compréhension très claire des limites des bâtiments et des systèmes de planification existants. Et de voir que les nouvelles générations d’architectes produisent de nouvelles connaissances, questionnent concrètement la bureaucratie de Bruxelles et recherchent de nouvelles façons d’ouvrir, au niveau politique, de nouvelles conditions pour créer ces objectifs qui sont nôtres.

 

Roch BRANCOUR
adjoint à l’urbanisme de la métropole d’Angers (FR)

Par rapport à nos attentes et dans la continuité de ce qui vient d’être dit, nous attendons des idées réalistes, incarnées, des techniques même, beaucoup plus que des concepts et en même temps, on souhaite que ces idées soient au carrefour de trois choses. Un, des idées de programmation bien sûr, des idées de fond sur les types de production, d’activités, etc. Deux, une méthode : des idées nouvelles innovantes et assez précises sur les méthodes à employer pour travailler sur l’aménagement, ou l’évolution du site qui nous intéresse. Et enfin, un état d’esprit : ces idées doivent incarner un état d’esprit, qui, pour nous, à Angers, doit essayer de voir comment mettre l’homme, la personne, au cœur du projet d’aménagement.
De mon point de vue, la manière de conduire le projet doit prendre en compte l’identité de notre territoire. Et quand je parle d’identité, je parle de quelque chose qui est là pour resituer l’habitant, le travailleur, la personne au carrefour entre son histoire (son passé et son avenir) et celui, d’un point de vue peut-être plus spatial, entre le lieu sur lequel on est (le territoire en lui-même) et les territoires qui l’environnent. Il est donc important que ces idées, qui doivent être très concrètes sans s’illusionner dans le concept abstrait, soient des manières d’incarner une méthode, un programme, mais aussi un lien avec l’identité du territoire.

Faire évolution le site par les programmes
Resituer l'habitant au cœur du projet
 

Jean-Etienne SURLÈVE BAZEILLE
adjoint à l’urbanisme de la Ville de Bègles (FR)

Le territoire que nous proposons est en bordure de Garonne, avec une activité productive encore importante, une papèterie qui, il y a encore un siècle, transformait la forêt des Landes en pâte à papier et qui aujourd’hui transforme les briques qui arrivent notamment de l’Est de l’Europe en pâte à papier. Ce que nos attendons de ce territoire, ce sont des interrogations, des réponses et des parts de rêve. La question qui est posée est : doit-on maintenir ces activités ? La réponse est certainement oui. Sont-elles, par exemple pour cette papèterie, surdimensionnées en territoire, puisqu’elles couvrent près d’une dizaine d’hectares ? Peut-on réduire ces activités tout en les maintenant et utiliser l’espace différemment ? Que faire de la façade de cette magnifique Garonne, occupée par une autoroute jusqu’à la future gare de Bordeaux ?
On voit dans l’interrogation que ce sont aussi des villes où on doit introduire une part de rêves. Tout le monde veut une ville agréable, des jardins, de la beauté… mais quand on parle d’industrie, on dit « non, c’est sale, ça pue, ça fait du bruit… » On le veut ailleurs. Et ça, c’est notre côté très ambivalent, très ambigu, car on ne veut pas le voir – « not in my backyard, pas dans mon voisinage ». Et ce que nous aimerions sur ce territoire, c’est à la fois avoir autant d’ambition que Barcelone et construire des beaux bâtiments, marqueurs, dissonants par rapport au Bordeaux du XVIIIe siècle. Mais c’est aussi être un morceau de l’entrée dans la métropole. C’est peut-être proposer, devant ce magnifique paysage, de fabuleux logements avec de grandes terrasses ; et peut-être alors, parce qu’on est bien logés, va-t-on accepter les activités industrielles, car ce sera ces échanges-là : mieux habiter, mieux voir, et même si à côté, il y a quelque chose qui ne va pas (une odeur ou un bruit), eh bien ce sera la part à donner en contrepartie. Et ce que l’on attend des architectes, c’est de mouliner tous ces paramètres sur ce linéaire et apporter des réponses qui font rêver et donnent envie de réaliser.

Comment réduire l'activité et la maintenir ?
Comment utiliser l'espace différemment ?
 

Julien HERNANDEZ
élu de la ville d’Amiens (FR)

Le site que nous proposons pour Europan 14, dans la zone d’activités de Montières, est très large, puisqu’il compte une centaine d’hectares, dont environ 40 sont aujourd’hui à l’état de friche. Je me retrouve dans beaucoup d’interventions qui ont été faites, et notamment dans cette idée de la ville idéale. La ville d’Amiens est la ville de Jules Verne, qui a expliqué qu’Amiens était cette ville idéale. C’était à la fin de XIXe siècle, avec cette industrie lourde qui s’est installée, et notamment celle du textile, qui a fait la richesse de notre ville. Sur le périmètre que nous proposons, nous avons l’usine Cosserat, qui regroupe différents patrimoines : industriel, historique, mais aussi la mémoire sociale des ouvriers qui y ont travaillé par milliers et qui la voient se dégrader et être à l’abandon. Ce que nous attendons pour cette zone, c’est la création de connexions pour le quartier, actuellement complètement enclavé, qui est en même temps dans un périmètre historique, en façade avec la cathédrale d’Amiens (classée 2 fois au patrimoine mondial de l’UNESCO), mais qui est aussi dans un périmètre naturel exceptionnel.
Donc, l’idée serait de créer des passerelles avec l’environnement proche, mais aussi un lien à l’intérieur de ce territoire en maintenant l’activité industrielle, qui est plutôt aujourd’hui de l’ordre artisanal, en faisant en sorte d’y inclure du logement, de l’habitat de qualité, et pouvoir se dire qu’à cet endroit, on a une capacité à développer tous les possibles. Nous souhaiterions que ces deux termes guident les architectes : créer de l’innovation et de la qualité sur ce territoire.

Héritage industriel et historique
Créer un lien dans le territoire
 

Virginia GIANDELLI
architecte, Vice présidente d’Europan Italia

À Milano, qui est la capitale économique d’Italie, il y a beaucoup de monde qui vient pour travailler, il y a beaucoup de travail innovant. La ville a donné beaucoup d’espaces pour ces activités, elle a fait des appels de coworking dans ses propres bâtiments publics. Mais bien qu’elle ait donné de nombreux espaces aux jeunes pour monter des startups, des hubs, des Labs ou autres innovations, elle n’a toujours pas réussi à résoudre certains problèmes de logistiques, comme la qualité de la connexion Internet par exemple.
Par rapport à la question de l’agriculture urbaine, à Milano, on ne parle pas « d’agriculture urbaine » ou de « jardins familiaux » ; c’est de la vraie agriculture : la ville produit du maïs, on a des vaches, du blé, du riz… Mais que faire pour que les habitants qui sont agriculteurs dans le périmètre de Milan et qui ont de très belles fermes, ne quittent pas la ville pour laisser la place à l’urbanisation ? On a empêché de bâtir au sud de Milano, on a fait un parc agricole, etc., mais on va également donner aux agriculteurs la possibilité de commercialiser leurs produits. Depuis quelques années, la ville a obligé les cantines des établissements scolaires de la ville à consommer des aliments produits localement. Et ça, c’est un moyen de donner une chance aux agriculteurs de rester sur place.

 

Enfin, j’ai entendu une ville dire : « On attend des architectes qu’ils nous donnent des idées ». Mais peut-être que ces idées seront données pour changer les règles et les normes. En Italie, on a beaucoup de villes moyennes qui ont hérité d’un patrimoine assez important et qu’il faut réhabiliter avec des règles assez strictes. Car si on ne le réhabilite pas, il est inutilisé et potentiellement squatté. Donc, peut-être que cette rencontre entre les villes et les idées innovantes de jeunes professionnels pourrait servir à franchir la ligne des règles et des normes.

Didier REBOIS
Secrétaire général d’Europan

Nous sommes à un tournant important dans la fabrication urbaine et personne aujourd’hui ne semble plus s’opposer à l’introduction d’activités productives dans les tissus urbains. Mais il faut s’interroger, dans chaque contexte, sur les activités liées à la production qu’on peut inclure dans la ville, bien sûr en s’adaptant à des contextes très différents. Il y a une diversité et une émergence de nouveaux usages liés à la productivité urbaine à différents niveaux ; il y a des formes d’activités industrielles compatibles ; de nouveaux services urbains liés à la production ; une nouvelle économie liée à la connaissance ; celle liée à des circuits courts entre production et consommation, etc. Mais je voudrais, en guise de conclusion, recommander à tous ceux qui vont élaborer les dossiers de sites à destination des concurrents d’Europan 14, de ne pas juste « mettre le problème sur la table ». On a eu aujourd’hui beaucoup de questionnements très intéressants, mais si vous voulez des réponses pertinentes et innovantes, il faut donner aux participants un certain nombre de paramètres par rapport à vos contextes, prendre des risques vous-mêmes, au niveau programmatique ; vous pourriez indiquer vos ambitions en matière de développement économique dans vos sites et même indiquer, sur une zone urbaine, le type de production espérée, mais aussi l’échelle en pourcentage de territoire occupés : 15 à 20% d’activités productives ? Et expliciter aussi comment arriver à un certain dosage compatible entre habitat et activités productives.
Les sites ne doivent pas forcément proposer des programmes détaillés, mais plutôt des cadres programmatiques assez structurés et à l’échelle de chacun des sites, puisqu’ils sont dans des contextes très différents. C’est là la clé pour obtenir des réponses intéressantes de la part des concurrents. Car dans Europan, 50% des concurrents répondent dans un autre pays que le leur ; un Italien répond en Norvège, ou un Suisse en Espagne ; les concurrents ne connaissent donc pas forcément très bien le contexte dans lequel ils vont inscrire leur réponse et il faut leur fournir des éléments de compréhension, en particulier sur la nature de cette nouvelle production et la part qu’elle peut prendre pour être compatible avec la ville. Je dirais que recevoir des idées innovantes de la part des jeunes professionnels va dépendre de la qualité de la problématique et de la clarté des objectifs que les villes et les partenaires des sites vont donner aux concurrents.

Découvrez ci-après les points de vue :

- de villes européennes
- d'équipes primées

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