SAVOIR TERRE

Aurillac (FR) - Mention Spéciale

DONNÉES DE L’ÉQUIPE

Représentante d’équipe: Florence Carrières (FR) – architecte urbaniste
Associés: Sabine Bachelet (FR), Nelly Revol-Buisson (FR), Perrine Vouillon (FR) – architectes; Guillaume Blaise (FR) – ingénieur en construction

7 Passage du chemin vert, 75011 Paris (FR)
+33 695 364 346  – savoirterre.e14@gmail.com

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F. Carrières, N. Revol-Buisson, G. Blaise, S. Bachelet & P. Vouillon 

 

INTERVIEW
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1. Comment s'est constituée votre équipe à l'occasion du concours ?

Notre équipe s’est fédérée à l’occasion d’Europan 14. À Clermont-Ferrand, à Grenoble ou encore à Epinal, nous nous sommes rencontrés au cours de nos années d’études durant lesquelles des liens amicalement architecturaux se sont créés. Aujourd’hui, impliqués dans les domaines de l’architecture, du paysagisme et de l’ingénierie, entre Paris, Annecy, Francfort, Albertville et Zurich nous formons une équipe de 5 membres complémentaires dans le métier d’architecte. Le (grand) paysage qu’il soit urbain ou rural nous est à chacun très cher. Du haut d’une montagne ou au carrefour de deux rues, notre philosophie commune repose sur l’arpentage et expérimentation sensible du territoire afin de mieux le percevoir.

2. Quelle est la problématique principale du projet et comment avez-vous répondu à la question centrale de la session : la place des activités productives au sein de la ville ?

La problématique principale repose sur le mitage urbain en périphérie proche du centre historique et l’omniprésence de la voiture qui pourrait altérer les fortes qualités du territoire aurillacois à court terme. L’engouement du secteur tertiaire en périphérie au détriment du tissu social et commercial en cœur de ville favorise des trajets pendulaires qui mitent sensiblement le territoire aurillacois. Au regard de ces constats, le projet utilise le paysage comme matière première et comme structure du territoire rural. L’objectif est de valoriser le patrimoine existant et de créer de nouveaux espaces attractifs et productifs en lien avec la politique de développement durable, un axe prioritaire de la ville. Ce paysage environnant, et particulièrement ses lisières urbaines, offrent des lieux d’appropriation pour les habitants, des lieux d’expérimentation et de production. L’objectif est de redonner à voir aux habitants toute la richesse des activités proposées pour les intégrer à leur quotidien et ainsi réinvestir le cœur de ville comme un lieu d’échange, de rencontre et de partage.
 

 

3. Comment la problématique et les questions posées par la mutation du site se sont-elles croisées ?

Au regard des caractéristiques géographiques du site, les aménagements projetés intègrent la problématique du lien entre les différents types de paysages existants mais aussi entre les différents acteurs (habitants, agriculteurs, touristes). Ce paysage devient à la fois productif et récréatif. Depuis le parc de la visitation jusqu’au Gravier, le paysage rural et sa nature productive reviennent progressivement dans l’espace urbain dans une perspective de reconquête du centre-ville et du quotidien des usagers. Notre analyse intègre l’ensemble des rives de la Jordanne. Elle devient le départ d’exploration du territoire en valorisant les nombreux chemins existants. Partant du centre-ville médiéval et composée d’aménagements en lien avec la rivière, une promenade piétonne vient créer un contexte temporel doté d’une dimension collective, participative et productive. La transformation urbaine sur l’espace du foirail et de la friche correspond au point central du projet où un programme mixte ramène différentes productivités au cœur du centre-ville pour lui redonner une attractivité sociale. Cette nature productive est valorisée par la création d’un supermarché participatif et coopératif « Loc’Halles » prenant place dans des serres sur la friche Engie. Ce nouveau bâtiment permet d’amener les lieux de production au sein même du bassin de consommation, de soutenir les producteurs locaux et de développer les circuits courts tout en impliquant les consommateurs dans la chaîne de productivité. Grâce à une analyse précise sur les besoins de stationnement de la population, les berges de la Jordanne ont pu être désengorgées de la présence de la voiture et intégrées au processus de renaturation du centre-ville. Une production sociale et culturelle peut alors se développer sur ces berges qui relient le cœur historique au nouveau quartier de la Friche Engie. Le regroupement du stationnement dans un parking semi-enterré facilite une lecture des espaces urbains paysagers et du parcours de la Jordanne au sein du centre-ville.

 

 

4. Avez-vous déjà traité cette problématique précédemment ? Quels ont été les projets références pour le vôtre ?

Plusieurs références architecturales, paysagères et urbaines nous ont inspiré tout au long de notre étude pour développer notre démarche et notre stratégie d’intervention locale. Le projet “Perreux River banks” réalisé par l’agence BASE nous a questionnés sur le réaménagement des berges de la Jordanne. Cette référence paysagère et environnementale associe judicieusement les modes de vie urbains et le respect de la biodiversité existante. L’aspect innovant et fédérateur du projet de “tour maraîchère” de l’agence Ilimelgo a attiré notre attention au vu du concept d’agriculture urbaine. Par la mise en valeur de la filière de production alimentaire courte, ce projet nous montre toute la force de l’architecture et de l’impact qu’elle peut avoir sur un “écosystème humain” et la vie communautaire d’un quartier. Au regard de la pollution des sols de la friche Engie et la topographie du site, nous avons pris comme référence le projet “l’histoire mystérieuse du jardin qui produit de l’eau”, situé à Cehegin en Espagne et réalisé par l’agence Como Crear Historias. Ce projet minutieux s’insère dans un immense “vide” délaissé du village en se raccrochant aux usages que les habitants avaient créés dans ce no man’s land. Le projet est une longue promenade publique qui descend progressivement et est accompagnée par le trajet de l’eau. Usée à son départ, elle se purifie en passant par de multiples bassins pour pouvoir être utilisée à la fin de sa course. Ce jardin habitable devient alors une source d’eau mais également de rencontres, d’échanges et de contemplation pour les habitants.
 

 

5. Les projets urbano-architecturaux de type Europan ne peuvent se réaliser que dans une relation aux acteurs à travers un processus négocié et dans le temps. De quelle manière avez-vous intégré cette question dans votre projet ?

Ce projet d’une telle envergure ne peut se concevoir et se réaliser que par un travail d’équipe avec l’ensemble des acteurs de la ville mais aussi avec les habitants. Ainsi tout au long du processus de projet, nous envisageons de mettre en place des temps de concertations avec les habitants, les élus, les écoles, les futurs usagers et donc d’élaborer une démarche participative avec l’ensemble des acteurs du territoire. Diverses activités seront mises en place, des promenades urbaines, des ateliers, des journées de co-conception afin de recueillir les besoins et les avis mais aussi d’impliquer les aurillacois dans un projet commun. Ce projet est composé d’un phasage afin de pouvoir réaliser progressivement les nouveaux espaces du centre-ville en tenant compte du contexte existant.

6. Est-ce la première fois que vous êtes primé(s) à Europan? De quelle manière cela peut-il vous aider dans votre parcours professionnel ?

Etre primés à Europan est une première pour nous tous. Nous le prenons aujourd’hui comme une expérience enrichissante pour nos parcours professionnels. Ce concours nous a permis d’avoir une meilleure compréhension des domaines d’activités liés aux autres personnes du groupe (domaine de compétences, méthode de travail, expériences passées, ...). Cette pluridisciplinarité nous a aidés à mener ce projet en intégrant un maximum de contraintes. En outre, être confrontés directement aux interlocuteurs et habitants d’Aurillac représente pour nous une réelle chance d’exploiter et d’approfondir notre intérêt commun pour les domaines de l’urbanisme et de l’architecture et cela par un travail en équipe. Enfin, en plus de nous donner une première méthode de travail vis à vis de projets de cette ampleur, cela donne aussi l’accès aux jeunes architectes à une première opportunité de travailler sur une commande publique et ainsi de pouvoir réaliser des études et projets de grande envergure.