Nantes (FR)

Les défis du milieu habité

Le site de l’Hôtel-Dieu se présente actuellement comme un isola hospitalo-universitaire mono-fonctionnel, densément bâti et sans lien avec les espaces qui le bordent. L’échelle monumentale de ses bâtiments le rend pourtant très présent dans le paysage urbain nantais. Véritable mégastructure hospitalière, l’Hôtel-Dieu est composé d’un ensemble disparate d’édifices construits entre 1951 et 2013 dont le plus emblématique - et le premier à avoir été construit - est le bâtiment croix conçu par Michel Roux-Spitz, l’architecte de la reconstruction de Nantes. Ce bâtiment à ossature métallique et aux façades parées de béton culmine à 42 m et totalise à lui seul 76 000 m2 de surface plancher. Les autres édifices se sont agglomérés entre les ailes de la croix au fil de l’évolution de la médecine et des besoins liés à l’augmentation du nombre de patients et d’étudiants jusqu’à atteindre plus de 250 000 m2 de surface plancher. Certains d’entre-eux forment des bâtiments repères symbolisant désormais le CHU au même titre que la croix. Résultat de ces années d’extensions successives, le site de l’Hôtel-Dieu est opaque aux flux de la ville et est construit et imperméabilisé à hauteur de 95%, laissant peu de place au vivant animal et végétal. Le sol de cet îlot, composé de remblais issus de l’ancien Hôtel-Dieu détruit pendant la Seconde Guerre mondiale sur une profondeur de 3 à 6 mètres, est d’autant plus inerte que la majorité des connections entre les différents services de l’hôpital se font par un réseau très développé en sous-sol.
Le déménagement du CHU à l’horizon 2027 dans de nouveaux bâtiments actuellement en construction sur l’île de Nantes est l’opportunité de donner une nouvelle programmation et interprétation à la vocation hospitalière de ce site situé en bordure de Loire et en plein cœur de la métropole, entre le centre-ville et l’île de Nantes, en l’ouvrant à la ville, à ses habitants et plus largement au vivant dans toute sa diversité.

Questions au concurrents

La position centrale et stratégique du site de l’Hôtel-Dieu ainsi que son lien privilégié à la Loire induisent deux types d’ambitions en apparence contradictoires. D’un côté, la renaturation et l’engagement à la création d’un parc nourricier doivent être des leviers importants pour reconstituer un milieu habité résilient et propice à une certaine forme de biodiversité en ville en relation avec le projet d’aménagement urbain « Loire au cœur » comprenant la requalification des bords de Loire et de la place-parc de la Petite-Hollande.
D’un autre côté, la valeur patrimoniale des bâtiments (dont le bâtiment monumental en croix labellisé Patrimoine du XXe siècle) et l’engagement de la métropole pour la sobriété foncière imposent de tirer au mieux parti des ressources du site pour développer de nouvelles manières d’habiter et de travailler en ville et y implanter une diversité d’activités. Comment donc « faire avec » ou « partir de » cet héritage complexe et hétéroclite, tout en œuvrant à l’épanouissement d’un milieu habité favorable à la santé, plus ouvert et plus riche, à l’échelle du site comme à l’échelle de la métropole ? Comment retrouver du sol fertile, vivant, nourricier mais aussi du sol actif, des espaces publics ou communs, vecteurs d’échanges et de rencontres ? Quel dialogue instaurer avec la Loire et comment faire participer le site au rétablissement des continuités écologiques à l’échelle du grand territoire ?
Et, enfin, par quoi commencer, à quels espaces donner accès en priorité ? Comment engager la reconversion du site et permettre sa ré-habitation presqu’immédiatement après le départ du CHU ? De quelles façons occuper le site et avec quels usages ? L’échelle du site et l’imbrication de ses infrastructures impliquent en effet la mise en place de stratégies de réinvestissement agiles et habiles, au-delà des expérimentations actuelles d’urbanisme transitoire ou de préfiguration et qui permettent de retrouver des échelles de projet appréhendables. Comment ce réinvestissement s’inscrit-il dans un projet de transformation du site à court, moyen et long terme ?