Point de vue de villes européennes

Forum Inter-Sessions E13/E14 - Badajoz (ES) - Débat

Points de vue de villes européennes

BRUXELLES (BE)
Kristiaan Borret, Bouwmeester de la Région de Bruxelles-Capitale

En plein centre de Bruxelles, à 3 ou 4 km de la Grand Place, sur le canal, face à des rangées de maisons typiques du Bruxelles du XIXe siècle, il y a une usine de production de béton. Cette usine, en plein cœur de Bruxelles, approvisionne en béton tous les sites de construction de la ville. Le sable et le ciment y sont amenés par bateau, puis des camions le distribuent. Cette usine, à cet endroit, répond à un besoin. Et il s’agit là, avec cette juxtaposition des maisons et de l’usine, d’une image typique de la ville. Ceci fait partie de la ville urbaine. Alors qu’on aurait pu déplacer l’usine et y installer un bel espace public et des habitations le long du canal, nous avons décidé de maintenir cette usine comme partie intégrante de la ville, car nous pensons qu’il est important de fournir de l’espace à la ville pour les activités productives. C’est évidemment devenu à la mode, et vous connaissez certainement tous ces activités de hipsters accueillies avec joie dans nos villes : des micro-brasseries aux fabricants de chocolat artisanal, en passant par des ateliers de vélos, etc. Ces activités sont les bienvenues, mais elles ne sont pas les seules activités productives. A Bruxelles, nous pensons qu’il faut également considérer les emplois « sales » : les réparateurs, les cols bleus, etc. Nous devons éviter que ce type d’emplois soit rejeté en dehors de la ville faute de pouvoir payer les loyers car le prix du terrain a trop augmenté. Il serait idiot qu’un plombier vivant et travaillant dans le centre de Bruxelles, doive d’abord sortir de la ville pour s’approvisionner en matériel, pour ensuite y revenir et faire son travail.

… aux emplois "sales"
 

Il est important de maintenir quelques activités productives dans la ville, et cette idée est déjà inscrite à l’agenda politique de la Région Bruxelles. Le « pourquoi » a été discuté et accepté. Reste désormais le « comment ? »
Il faut s’assurer que le terrain est disponible, que son prix ne soit pas uniquement influencé par le développement immobilier ou le potentiel de construction d’habitations, sans quoi il sera trop cher pour des activités productives. Ainsi, dans certaines zones stratégiques, il a été décidé qu’au moins 10 à 20% des nouveaux développements concerneront des activités productives.
Pour cette aire du Canal (une ancienne zone industrielle au centre de Bruxelles, où les autorités publiques elles-mêmes possèdent de nombreux terrains), nous avons élaboré un Plan Canal avec pour principe de réserver de grandes parties de tous ces terrains pour l’économie productive, et non de les vendre sur le marché de l’immobilier. Puis nous avons organisé des concours d’architecture, car il faut inventer pour cette production de nouvelles typologies, explorer les possibilités et stimuler l’expérimentation.
En tant que Bouwmeester, je travaille non seulement avec les acteurs publics, mais également avec les privés. Nous avons ainsi par exemple pu convaincre une usine de béton d’investir 2 millions d’Euros dans l’amélioration de leur site, non pour un simple embellissement, mais pour une meilleure organisation du site afin d’y limiter les nuisances pour le voisinage et d’offrir l’accessibilité aux quais comme espace public le weekend. Les compagnies économiques productives sont les bienvenues en villes, et elles peuvent y rester, à condition qu’elles soient prêtes à adopter un « visage urbain ».

 

Dans ce domaine nous finançons aussi la recherche by design : lors de la dernière Biennale d’Architecture de Rotterdam, nous avons donné trois contrats à trois partenaires afin d’explorer des solutions réellement concrètes. Notre question est celle de la combinaison des logements et d’économie productive, logistique, au sein de la ville.
Par exemple, à partir d’une une voie d’entrée dans la ville (une autoroute) facilement accessible pour les camions, nous souhaitons créer un centre de distribution logistique. Le projet prévoit un bâtiment haut, avec de l’économie productive et une sorte de « façade » d’habitations qui vient emballer le tout et de l’espace public. Les programmes sont mélangés dans un seul bâtiment, aux niveaux de l’architecture et de la typologie architecturale.
Un autre exemple est un quartier au nord de Bruxelles avec beaucoup de petites activités. La proposition cherche à les regrouper de façon mixte, plutôt informelle, mais soigneusement préparée avec, à nouveau, les trois ingrédients : de nouvelles possibilités de logement, un peu d’économie productive, et une école technique, le tout arrangé le long d’un même espace public.

 

Notre idée est de considérer l’activité productive comme faisant partie de la ville, pas de la cacher, mais parfois même de la montrer sur les espaces publics, de l’exposer et de la rendre aussi présente que le logement, car nous devons considérer que tous ces ingrédients font partie de la ville. L’industrie dans la ville est urbaine.

AMSTERDAM (NL)
Sabine Lebesque, Investor Office Housing

Amsterdam a un centre médiéval très caractéristique, entouré d’une enceinte périphérique datant du XIXème siècle, puis des extensions du XXème siècle suivant une structure de doigts, comme par exemple à Copenhague (DK), où les zones vertes sont accessibles très rapidement. Cela signifie que les frontières d’Amsterdam sont assez proches l’une de l’autre et que l’espace est strictement circonscrit et limité. Cela ne constitue pas pour autant un problème pour le développement de la ville, car nous travaillons depuis près de cent ans avec un système de bail immobilier, et la Ville possède de surcroît 88% des terres, ce qui facilite le développement.
Nous établissons également un nouveau plan structurel tous les dix ans, ce qui nous permet d’avoir une bonne vision générale du marché et de savoir dans quelles zones activer le développement. Le dernier plan structurel toujours en cours (jusqu’en 2020) impliquait déjà largement la région métropolitaine amstellodamoise, car nous prévoyions alors que la pression allait augmenter rapidement sur la Ville. L’attractivité des parcelles est assez élevée à l’intérieur de l’enceinte périphérique (qui couvre à peu près la même surface que le périphérique parisien), si bien que la pression y est très forte ; le prix de l’immobilier a donc augmenté très rapidement, particulièrement ces dernières années. Le plan structurel jusque 2020 prévoit le développement autour de cette route périphérique, afin que le centre puisse bénéficier des nouveaux développements, et inversement ; de cette manière, nous ne devons pas trop nous éloigner dans les quartiers excentrés et pouvons nous concentrer autour de cette route périphérique.
Il y a évidemment eu une baisse de production du logement pendant la crise, mais nous avons maintenant dépassé le nombre de constructions que nous avions pendant les « bonnes années » 2006 et 2007. La production est aujourd’hui plus élevée que dans les années ’80 ! Le résultat cependant, c’est que chaque usine ou espace ancien à l’intérieur de ce périphérique est transformé en logement. Il est très populaire de vivre dans de tels bâtiments, mais cela signifie que toute la productivité (à tout le moins celle qui était encore là) a migré vers l’extérieur.

Vue aérienne du centre-ville
Centre circonscrit et surexploité
Développement "en doigts" d'Amsterdam
 

En même temps, d’un point de vue économique, à cause de son rayonnement international, la croissance d’Amsterdam a été très rapide et la Ville se détache des autres villes du pays comme Den Haag, Rotterdam, Utrecht ou Eindhoven, au cours des 10 dernières années.
Cela signifie également que pour le centre de la ville, nous passons d’anciennes à de nouvelles industries. L’exemple de l’ancien site industrielle d’expédition, le NDSM, où près de 7.000 personnes travaillaient, a été transformé et abrite désormais des logements étudiants, mais aussi le QG de Hema, ainsi que MTv Europe et d’autres encore. Il y a maintenant 12.000 personnes qui travaillent là et la nouvelle économie, cette transition dans laquelle nous sommes actuellement, amène également de nouvelles formes de travail en ville.
Amsterdam est une ville favorable pour les startups, dans lesquelles nous investissons. C’est un autre type de production. La compagnie néerlandaise Booking.com a décidé il y a deux semaines de s’installer sur une nouvelle île conçue par UNStudio, à côté de la gare centrale. C’est un bâtiment de près de 70.000 m2 dans une zone importante de la ville, qui amènera 15.000 postes de travail, ce qui est considérable.
En ce qui concerne la pression du marché, notre débat politique se concentre prioritairement sur le logement, raison pour laquelle nous avons un plan supplémentaire, en plus du plan structurel : d’ici 2025, nous prévoyons 15.000 nouveaux appartements à Amsterdam. Cela entraîne un débat car si nous remplissons chaque petit bout de terrain par du logement, la productivité va être poussée vers l’extérieur de la ville et il est possible que nous en arrivions à une situation inverse à celle que nous avons connue dans les années ’80, quand les habitants étaient invités à vivre en périphérie tout en travaillant en ville. Si nous ne prêtons pas attention à cette pression du marché immobilier, les habitants finiront par vivre en ville et travailler en périphérie, ce qui n’est pas une meilleure situation. 

L'île Booking.com par UNStudio
 

Cependant, avec le nouveau plan logements pour 2025, nous devons envisager où nous travaillerons à l’avenir, dans quelles zones se situera le travail. Et c’est là que nous devrons prévoir des espaces de travail. Nous n’avons pas besoin uniquement de lieux productifs comme un garage par exemple, mais nous devons envisager le futur de l’emploi. C’est une question à laquelle il est difficile de répondre aujourd’hui, mais nous savons depuis Jane Jacobs que pour avoir une ville saine, il faut combiner la créativité, la ville productive, l’international et le local en un seul élément qui sera une ville où il y aura du travail aussi.

BARCELONA (ES)
Jaume Barnada, Directeur de la Stratégie et de la Durabilité urbaine, Barcelona (ES)

Économiquement, la région métropolitaine de Barcelona produit entre 15 et 17% du PIB espagnol. C’est une région où production et logement interagissent continuellement, et qui font son caractère spécifique. Si nous comparons le tissu résidentiel à celui de la production, nous constatons que les deux se superposent. Ceci est caractéristique des villes méditerranéennes où on évite de séparer les usages, car nous pensons qu’il est important de vivre et de produire dans un seul et même espace. Et un des défis principaux auxquels nous devons faire face aujourd’hui est celui de l’introduction du logement dans les zones productives. C’est essentiellement un processus architectural. La production se développe généralement à l’horizontale, alors que les logements se font à la verticale. Sur base de ceci, nous pouvons créer de nouvelles typologies architecturales qui reflètent une façon différente de vivre en ville. Cela fait maintenant des années que nous travaillons à Barcelona sur des modèles productifs, basés sur la réutilisation ou le recyclage de quartier, en les rendant à chaque fois plus complexe. L’exemple le plus célèbre est celui du Poblenou – 22@, où près de 3.000 travailleurs se rendaient quotidiennement dans les années ’70, et qui en accueillent désormais plus de 60.000. Cela signifie que nous y avons créé à peu près 57.000 emplois, et ce au cours d’une des pires crises économiques que le pays ait connues. Ce que nous avons fait, principalement, a été de complexifier l’espace à partir d’une production mono-usage pour créer ce que nous avons appelé une « lamelle » d’activité productive. Et si, auparavant, nous produisions des éléments lourds, chimiques, etc., aujourd’hui, nous produisons de la connaissance, de la nourriture, du design, de la culture, etc.

Vue aérienne du Poblenou
Plan urbain du Poblenou
 

Ceci génère 3 concepts sur lesquels travailler : le 1er est la création de nouveaux réseaux urbains qui complètent le tissu déjà existant. La production ne peut pas être une bulle à l’intérieur de la ville, elle doit faire partie intrinsèque de tout processus de rénovation et être directement liée aux résidences. Le 2ème concept est celui du changement de mobilité. Nous devons parier sur la mobilité publique et prendre nos distances avec le réseau de mobilité privé. Que ce soit ici, à Bruxelles ou à Amsterdam, nous devons nous concentrer sur la mobilité publique, et cela ne peut se faire que dans des villes à haute densité comme Barcelona. Et enfin, la 3ème idée est celle du changement du paysage architectural et urbain. Nous nous sommes rendus compte que certains processus de rénovation urbaine ont produit à Barcelona une certaine dérégulation des tissus traditionnels à partir d’éléments architecturaux. Certains peuvent voir cela comme un problème ; pour ma part, je pense que c’est incontestablement une bonne chose.

Génération de nouveaux réseaux urbains
Transports publics / mobilité
Architecture / Paysage urbain
 

Ces nouvelles logiques d’usages induisent des changements très rapides sur le territoire de Barcelona. Les quartiers peuvent changer en moyenne tous les 10 ans ; nous voudrions que cela se fasse tous les 7 ans, mais la population a besoin d’un peu de temps. Donc tous les éléments suscités ont produits d’importantes modifications dans le Poblenou au cours des 25 dernières années. Et nous pouvons désormais imaginer ce que sera ce quartier d’ici 15 à 20 ans, avec la certitude que nous produirons des changements substantiels tous les 10 ans. En outre, nous pouvons maintenir et même augmenter le niveau de production de la ville, tout en conservant le nombre d’habitants. De tout ceci résulte une ville dense et mixte où les tissus résidentiel et productif sont régénérés, avec de l’innovation, de la production de nourriture (nous avons de grandes zones agricoles sur le territoire métropolitain), et des processus de production d’énergie. La plupart des bâtiments publics produisent aujourd’hui de l’énergie, des logements aux écoles, en passant par les parcs où nous avons installé des pergolas photovoltaïques.
Mais ces transformations et changements soulèvent des problèmes, en particulier liés au tourisme. Ces 30 dernières années, nous sommes passés de 300.000 à 8 millions de touristes par an qui doivent trouver un logement dans des hôtels, et près de 30 millions qui ne font que visiter la ville. Nous sommes ainsi devenus la 3ème ville touristique en Europe, après Londres et Paris, avec des dimensions très différentes en termes de population et territoire. Nous pouvons évidemment mentionner le tourisme comme élément productif (et nous parlons d’ailleurs de « l’industrie touristique »), mais c’est alors l’élément productif qui génère le plus de désagréments et de tracas dans la vie des habitants. La pression dans le centre est insoutenable tant pour les magasins que pour les autochtones. Il est désormais commun de transformer une habitation en location touristique, ce qui produit de grandes zones de gentrification, qui est pratiquement en train d’envahir tout ce qui couvre le centre actuel de la ville. Nous en sommes donc arrivés à la conclusion que nous devons à nouveau réguler les usages et revenir au principe de la transformation industrielle. Mais nous ne pouvons pas transformer naïvement la ville en ville productive sans réguler précisément au préalable les types d’usages que nous souhaitons et où nous les voulons. Nous sommes donc en train de travailler sur des systèmes de limitations des usages, depuis le centre jusqu’à la périphérie, afin qu’ils soient complémentaires. Le premier à réguler est le tourisme ; nous travaillons sur cet aspect, car la ville est un espace pour les gens, ceux qui y vivent et y travaillent. Ça, c’est la base. Nous ne pouvons rien produire sans les gens et nous ne pouvons pas produire si les gens n’habitent pas la ville. Le premier élément de production n’est donc pas l’usine, mais bien le logement. Et nos projets sont principalement résidentiels, avec des activités de production et économiques.

Réguler le tourisme en centre-ville
Produire avec…
… et pour les habitants
 

MANNHEIM (DE)
Jens Weisener, architecte et urbaniste de la ville de Mannheim

Avec ses 300.000 habitants, Mannheim est une ville industrielle et elle veut le rester. Il existe là une grande cohabitation entre commerces, industrie et résidentiel. Nous sommes à une demi-heure, voire une heure, des grands centres que sont Francfort et Stuttgart, et comme l'Allemagne est décentralisée, leurs activités sont complémentaires : si Frankfurt est un hub financier, d'autres villes reprennent d'autres fonctions.
Il y a donc beaucoup de régions économiques différentes et l'espace entre Francfort et Stuttgart est très important. Il constitue en effet une plaque tournante de transport, non seulement grâce au Rhin, mais aussi en raison de nombreuses routes. À Mannheim, on en arrive même à un excès de développement / désenclavement : la ville possède un port très important, le 2ème port intérieur d'Europe et fait partie d'un axe, la Banane Bleue, ainsi qu’on la nomme, reliant la Méditerranée aux pays du Benelux. Qui plus est, situés à la convergence de trois régions (la Hesse, la Rhénanie-Palatinat et le Bade-Wurtemberg), nous fonctionnons main dans la main avec les villes et régions voisines. Toute la région fonctionne ainsi sur cette base et compte, au niveau économique, de nombreux acteurs mondiaux, répartis régionalement. Notre espace peut bénéficier de cet axe, même si nous évoluons avant tout dans un contexte régional.
Entre 2005 et 2007, les Américains se sont retirés de cette région, libérant de nombreux espaces au nord de Mannheim et au sud de Heidelberg ; au total 750 ha de superficie supplémentaire pour le développement non seulement du logement, mais aussi du commerce. Dans l'ensemble, la région devient métropolitaine, avec Mannheim comme plus grande unité, avec ses 300.000 habitants.
Cette ancienne ville baroque a prospéré comme centre industriel, avant d’être plus ou moins détruite pendant la seconde guerre mondiale. Elle est aujourd’hui entourée d’une ceinture industrielle, et l’industrie s'est installée de manière parfois tout à fait inattendue dans les quartiers. Il y a beaucoup de confrontations, pas toujours faciles à gérer dans la planification urbaine. En sus des acteurs mondiaux, il y a de nombreuses petites et moyennes entreprises, installées principalement dans la ceinture industrielle, et une grande population d'origine immigrée, d’environ 40 à 50%, dont une grande communauté turque qui développe une dynamique propre.

Contraste autour des berges du Rhin
Contrastes en centre-ville
Le Musikpark Mannheim, avec la Popakademie
 

Cela étant, comme la ville a une image industrielle, les prix des terrains accessibles permettent le développement de startups autour de nouvelles idées productives. La ville elle-même travaille avec des incubateurs d'entreprises ; les idées qui naissent à l'Université (30.000 étudiants dans la ville) peuvent commencer à être développées dans ces espaces, et, bien sûr, dans les 500 ha de friches industrielles récemment acquises.
En règle générale, face à une surface industrielle sur une berge du Rhin, il y a des réserves naturelles, qui sont tout à fait merveilleuses, mais qui entrent en conflit avec le besoin d’aires de développement résidentiels et du travail. Mais Mannheim se considère également comme une ville créative ; nous avons notamment la Popakademie, pour promouvoir des jeunes talents à travers une formation universitaire en pop business, mélangeant non seulement l'art et la culture, mais aussi l’économie. Et nous construisons actuellement un nouveau centre culturel et d'art en plein centre-ville, qui n'est pas financé par l'État, mais par le privé.

Découvrez ci-après les points de vue :

- d'équipes primées
- d'acteurs Europan 14

Retour à la page d'introduction